II.

Les fondamentaux de la transformation numérique

Le concept de « numérique » est si général et si ancré dans tant d’aspects de nos vies qu’il est devenu difficile de comprendre sa signification. Lorsque l’on tente d’expliquer ce qu’est la transformation numérique, cette tâche devient encore plus complexe. Les entreprises emploient ce terme pour créer et vendre leurs produits. Les gouvernements parlent de « politiques de transformation numérique » et de sociétés « intelligentes ». De notre côté, nous voyons cela comme un moyen de tout faire de façon plus rapide, plus intelligente, plus efficace et plus profitable.

Note

Terminologie de base : cartographier la confusion numérique

Numérisation, transition numérique ou transformation numérique ? Quelle est la différence ? Les termes les plus simples – que l’on emploie généralement de façon interchangeable – sont numérisation et transition numérique.

La numérisation renvoie au processus technique d’encodage d’une information analogique dans un format numérique, afin qu’un ordinateur puisse la stocker, la traiter et la transmettre. Par exemple, l’action de convertir des textes écrits à la main ou à la machine dans un format numérique par l’intermédiaire d’un scanneur.

La transition numérique est un concept plus général. C’est un processus qui va au-delà de la mise en place de données numérisées et de technologies numériques dont l’objectif est de modifier nos méthodes de travail et de transformer le dialogue et les interactions entre individus et entreprises.

Il est difficile d’identifier une définition applicable à tous, car la transformation numérique est différente pour chaque secteur et chaque individu.

De manière générale, la transformation numérique renvoie à l’intégration des technologies numériques dans tous les domaines d’activité, avec pour conséquences des changements fondamentaux dans la façon dont lesdites activités sont mises en œuvre et créent de la valeur pour nous et la société dans son ensemble. En conséquence, la transformation numérique n’est pas qu’une question d’automatisation, mais plutôt de modification de nos habitudes, de nos comportements et de nos vies, sous l’impulsion des technologies. Elle transcende toutes les frontières : politiques, économiques, sociales, technologiques, théologiques, psychologiques, légales ou environnementales, pour n’en citer que quelques-unes.

Les moteurs de la transformation numérique

1) La créativité

Croyez-le ou non, mais l’un des moteurs de la transformation numérique n’est autre qu’une qualité humaine essentielle: la créativité. Cette capacité à générer et reconnaître des idées et des alternatives afin de trouver des solutions ou de répondre à des besoins spécifiques, lorsqu’elle est associée aux possibilités offertes par les technologies pour résoudre des problèmes ou s’ouvrir de nouvelles perspectives, crée de nouvelles utilisations et applications technologiques, dans tous les domaines de nos vies, débouchant à terme sur des transformations profondes dans une discipline.

Quand on évoque la transformation numérique, il convient donc de brosser un tableau d’ensemble. Cette représentation se caractérise, d’une part, par l’intersection entre la technologie et la créativité en matière d’application de transformations numériques à des contextes nouveaux ou inhabituels et, d’autre part, par l’adoption généralisée de ces technologies en raison de leur importante valeur ajoutée qui modifie ou transforme les comportements en profondeur.

2) La diversité

Si l’on pousse ce raisonnement un peu plus loin, on arrive à un autre facteur moteur de la transformation numérique: la diversité. On entend ici non seulement la diversité des méthodes et des outils employés grâce au soutien des technologies numériques, mais aussi la diversité de ceux qui conçoivent ces outils et de ceux à qui ils sont destinés. C’est l’idée que la transformation numérique est avant tout une question de changement culturel.

Par essence, la technologie est étroitement centrée sur les individus : elle est conçue pour être utile à des personnes ayant des préférences et des besoins différents. Elle fleurit donc lorsqu’elle profite de l’apport du plus grand nombre possible de visions différentes. En outre, l’inclusion, en tant que concept, tire profit de la diversité sous toutes ses formes – âge, race, origine ethnique, sexe, orientation sexuelle, religion, milieu socioéconomique ou personnalité – et ambitionne de les intégrer lors de chaque phase de la création technologique. Les gens ont confiance dans les organisations qui les comprennent et peuvent le prouver, qui vont au-devant de leurs besoins et qui innovent dans une approche adaptée individuellement.

Note
Un groupe divers de personnes utilisant différents appareils numériques
Un groupe divers de personnes utilisant différents appareils numériques

La diversité est importante pour tous

L’industrie automobile offre un bon exemple de l’importance de la prise en compte de la diversité dans l’innovation technologique. Malgré d’immenses avancées technologiques en matière de sécurité routière, une étude (en anglais) publiée en 2019 par l’université de Virginie a révélé que la probabilité d’être blessé gravement ou de périr dans un accident de voiture était 73 % plus élevée pour les femmes. Les mannequins d’essai standards utilisés par les agences de sécurité internationales et toutes les marques de voitures sont en partie responsables de ce phénomène. Les mannequins sont en effet conçus d’après la taille, le poids et la structure corporelle de l’homme moyen.

Les chercheurs expliquent que les femmes sont plus susceptibles d’être blessées dans un accident de voiture en raison de différences liées à leur structure osseuse et musculaire, au positionnement de leur tête et de la ceinture de sécurité, à leur plus petite taille et à la façon dont elles s’assoient. Il ne suffit donc pas de réduire la taille des mannequins d’essai masculins. Les grandes distinctions physiologiques entre les hommes et les femmes sont source de réactions différentes aux accidents de voiture. Il est donc essentiel de prendre en compte ces différences biomécaniques et matérielles lors de la conception des mannequins d’essai

3) La maîtrise du numérique


En outre, la transformation numérique n’aura lieu que si les individus sont capables d’utiliser les technologies de l’information et de la communication indispensables pour comprendre les cultures numériques et s’épanouir dans ce domaine. C’est ce que l’on appelle l’habileté numérique, la culture numérique ou la maîtrise du numérique.

Une bonne maîtrise du numérique est essentielle pour comprendre cette époque de changements technologiques rapides. De grandes quantités d’informations sont disponibles, mais les décisions sont souvent guidées par des intérêts commerciaux. Il peut être difficile d’interpréter certaines choses pour diverses raisons.

La maîtrise du numérique est un concept plutôt général qui évolue aussi rapidement que les technologies numériques elles-mêmes – à l’image d’autres notions en rapport avec la sphère numérique. La maîtrise du numérique est une notion plus complète que le savoir-faire technologique. Elle inclut un grand nombre de pratiques éthiques, sociales et analytiques dans le domaine du travail, de l’apprentissage, des loisirs et de la vie quotidienne.

Exemple

Êtes-vous un enfant ou un immigrant du numérique ?

Vous avez peut-être déjà entendu l’expression « enfants du numérique » (digital natives en anglais). Elle désigne la nouvelle génération, très à l’aise avec la technologie, qui a grandi en utilisant des mobiles multifonctions, des tablettes ou des ordinateurs. Et tous les autres ? Tous ceux qui ont grandi avant la généralisation des technologies numériques – et qui ne sont donc pas « nés » avec ces technologies – sont qualifiés « d’immigrants du numérique ».

Ces deux catégories sont très souvent employées pour décrire les comportements respectifs de ces deux groupes à l’égard des technologies numériques. Les enfants du numérique sont plus à l’aise avec la technologie et l’utilisent activement, tandis que les immigrants du numérique sont des utilisateurs moins fervents.

De nombreux autres facteurs influencent l’attitude d’une personne à l’égard de la technologie, mais l’on peut sans crainte affirmer que c’est cette différence d’approche bien spécifique qui peut apporter une valeur ajoutée à la création technologique. Il est possible d’apprendre les uns des autres. La collaboration est ici un élément clé. En effet, les immigrants du numérique ont inventé de nombreuses technologies, tandis que les enfants du numérique sont eux capables d’en tirer le meilleur parti. La variété des compétences et des expériences est une donnée essentielle pour améliorer la technologie.

La fracture numérique

Tout le monde n’a cependant pas la possibilité de bénéficier de tous les avantages d’une société numérique. Certaines personnes n’ont en effet pas accès aux technologies de l’information et de la communication (TIC). On appelle ce phénomène la «fracture numérique». Il faisait initialement référence à la question de l’accès à Internet – ceux qui sont connectés et ceux qui ne le sont pas –, mais la signification du terme s’est élargie et inclut désormais une fracture liée à l’utilisation (le manque de compétences numériques entrave la prise en main des technologies) et un fossé lié à la qualité de l’utilisation (savoir utiliser les technologies de façon pertinente et en tirer le meilleur parti possible).

Il est important d’être conscient des problématiques qui résultent de la fracture numérique. Celle-ci prive certains citoyens de ressources essentielles à leur développement. Les conséquences sont négatives pour la société dans son ensemble et causent, par exemple, une montée du chômage, des inégalités sociales et des risques de marginalisation.

Le processus de transformation numérique est continu et bouleverse tous les secteurs, les uns après les autres. Dans la partie suivante, nous allons nous pencher sur les secteurs les plus touchés et sur ce que cela présage pour l’avenir
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III. La transformation numérique de la société